m^-. Digitized by the Internet Archive in 2009 with funding from University of Ottawa http://www.archive.org/details/josephreinachhisOOdutruoft Joseph Reinach Historien % 313 S HENRI DUTRAIT-CROZON Joseph Reinach Historien RÉVISION DE « L'Histoire de i'Affalre Dreyfus » CTome I, le procès de 18^4. — Tome II, Esterha^) PREFACE DE Charles MAURRAS -MM|€- PARIS ARTHUR SAVAÈTE, ÉDITEUR 76, RUE DES SAINTS-PÈRES, 76 1905 Au Général MERCIER A l'ancien Etat-Major ERRATA Page 17 Note I 62 ligne • 14 64 — 26 67 — 31 69 — 4 79 — II 127 — 15 et 16 r53 — 26 et 27 178 — 3 232 — 7 232 — 12 251 — 32 251 — 33 263 — 18 305 — 29 525 — 25 33^ — 13 343 — 5 361 — 28 361 — 33 364 — 21 387 — I 449 — 29 465 — II 515 — 28 321 — 9 540 — 14 lire Rennes I, 575. au lieu de I, 575, — ses — ces Placer toute la ligne entre guillemets. ail lieu de aurait lire avait - (2) - (i) — veux — peux — dilemne — dilemme — démasqué et dé- masquer — démarqué et dé- marquer — comparaison — Dreyfus — (3) — (2) — (2) — (3) Supprimer cette ligne. Ajouter^ , en tête de la ligne ; :(2) au lieu de commandement lire commandant — Valsive — Valsin Supprimer le mot il. au lieu de le que — que le — identique — indique — proscription — prescription — admissible — admirable — de fil — le fil peuve preuve Avant le mot qui, mettre une virgule, et après le mot copie, un point d'interrogation. Avant parla, ajouter lui. Ajouter d' au commencement de la ligne. Entre les mots avait et dictée ajouter été. au lieu de contre lire entre PRÉFACE L'ancien capitaine Dreyfus a été condamné, par deux fois, en Conseil de guerre, pour avoir livré à l'Allemagne les documents énumérés dans un bordereau écrit de sa main et découvert chez l'ambassadeur allemand. Lui-même a reconnu, le 5 janvier 1896, avoir trafiqué de ces pièces et, le 19 septembre 1899, en accep- tant sa grâce, il a confirmé ses aveux, La défense de ce condamné semblait interdite par la force des choses et par le bon sens. Mais, aussitôt que son parti se fut emparé de l'Etat, dès le mois de septembre 1898, ses instances en revision eurent lieu dans des conditions de faveur inouïes. Les formes coutumières de la justice furent changées, les lois tournées ou violées, toutes les juridictions fatiguées, les garanties doublées et redoublées sans fin. Le procès de Rennes a tenu vingt-cinq audiences, entre le 7 août et le 9 septembre. La première enquête de la Cour de cassation avait excédé deux trimestres ; la nouvelle n'était pas finie après douze mois. L'intérêt de Dreyfus, comparable à celui d'un prince apparenté à la Maison régnante, obligeait donc les juges à prendre et à reprendre, à peser et à repeser, une par une, en leur détail le plus extrême, toutes les minuties de fait, toutes les broutilles de droit. S'ils ne faisaier^t que leur devoir, on avouera que ce devoir fut bien négligé envers tout autre que Dreyfus ! La justice la plus som- maire était trouvée trop bonne encore pour quiconque avait eu l'audace de se prononcer contre lui ; si l'on ne s'est pas délivré du général Mercier et du lieutenant-colonel du Paty de Clam en les accrochant à quelque lanterne, c'est que le peuple de Paris, même dans les milieux révolutionnaires, ne fut jamais très favorable au faux innocent. Ce que le peuple n'a jamais voulu tenter, l'Etat l'eût fait s'il l'avait pu. Il usa de tous ses pouvoirs. Les disgrâces, les peines disciplinaires elles blâmes furent prodigués à tout le per- sonnel civil et militaire C|ui s'était permis d'élever des objections contre une doctrine d'Etat : la langue officielle appela vérité les fictions propices au traître, et mensonge l'évidence qui le char- geait ; certaines preuves de son crime, étant trouvées embarras- santes, furent étouffées ou falsifiées, toutes les fois que l'on en trouva le moyen. Là ne s'arrêta point l'influence des pouvoirs publics. Ils s'appli- quèrent aussi à décourager l'examen des particuliers. Tout souvenir donné à la Défense nationale fut traité d'importun, du haut de la tribune. Un seul souci : Dreyfus. Le nom de cet homme imposa son obsession à l'esprit public. Les badauds des deux mondes se le représentèrent comme la pure image du Juste flagellé et de l'Inno- cent mis en croix. Il en résulta une crise de monomanie religieuse qui fit classer et considérer tous les cultes suivant leur degré d'amitié ou d'éloignement pour la communion dreyfusienne. Le judaïsme gagna de la sympathie, quelques dames s'y convertirent parce que c'était la religion d'un martyr. Le protestantisme obtint de précieuses marques de déférence, en tant que doctrine des Droits de l'Homme. Pour le cathohcisme, il fut traité en ennemi Les associations catholiques furent proscrites pour différentes rai- sons, mais la plus pressante a été que les pères jésuites et les pères assomptionnistes observaient une règle incompatible avec le sym- bole du nouveau dieu. Un vrai martyr eût dit que c'était trop de palmes et trop d'au- réoles. Un innocent qui eût été, je ne dis même pas de race française, seulement de cœur droit, aurait été troublé dans sa conscience par ce déchaînement des querelles civiques, morales, religieuses ; il aurait hésité à pousser son droit à l'extrême, se demandant peut-être si le repos de tous ne mérite pas d'être pré- féré au droit de chacun. Rendue compatissante par ses propres malheurs, cette victime d'une véritable infortune eût épargné à la nation de nouveaux maux ; elle eût tout essayé soit pour adoucir les anciens, soit pour en effacer la trace. Mais les créances fausses font les créanciers les plus durs. Dreyfus, traître avéré et plaideur privilégié, considéra que son abus persévérant de la bonhomie nationale, son excès de quiétude et son orgie d'impu- nité ne lui donnaient pas une satisfaction complète. Parce qu'il jouissait du libre parcours dans la rue et pouvait paraître en pu- blic sans courir le risque d'être assommé, il voulut que la tolé- rance lui fût confirmée hautement, que la faveur devînt honneur et qu'une charte solennelle lui fut souscrite dans les formes par son esclave et son complice, l'Etat français, qu'il avait trahi autre- fois. Le procès en réhabilitation a donc commencé, quoiqu'il en puisse coûter encore à la France. Nouveau pourvoi, nouvelles plaintes ; peut-être, hélas ! nouvelle crise et nouvelles agitations. Di- version favorable à tout ce que pourra tramer contre nous l'Étranger et, qui le sait? à défaut d'un nouveau Sedan, nouveau Fachoda. Plus que de l'hystérie de nos guerres civiles et de notre abaisse- ment national, plus que de la fureur de nous vendre à travers l'Eu- rope, ce misérable est travaillé de la curiosité de voir, de sentir, de connaître jusqu'à quel point précis il lui sera donné de se moquer de nous. Sa dernière promenade judiciaire est le plus san- glant des défis. Si l'on veut réfléchir à la force de son insulte, on obtiendra un commencement de lumières sur le degré de l'impu- dence auquel peut s'élever, de nos jours, un drôle né juif. Commencement d'ailleurs modeste. En avançant dans l'étude d'un tel sujet, l'on se convainc qu'il y a plus beau que Dreyfus. Il y a les meneurs du parti de Dreyfus. Chez le traître, domine une inconscience née de l'insensibilité. Il ose tout, ne sentant rien. Leur audace, à eux, est allante, outrancière, un peu risque-tout. On sent qu'elle jaillit d'un fond derancuneet de rage, d'une faim, d'une soif, d'une volonté de vengeance servie par de patients calculs. Ils ont, dans leur crapule et leur scélératesse, un air de cynisme éclatant qui ne manque pas d'un certain intérêt pittoresque. Dreyfus attriste, ennuie et dégoûte du genre humain. Mais les mensonges faits pour ce traître blafard sont tout au contraire voyants, luxuriants, menés en apparat et contés avec verve : énormes inventions de na- vigateurs levantins ou fmauderies de bazar, ces ruses variées peuvent arracher un sourire. En nous faisant penser à Jean-Jacques et à Robespierre, elles évoquent Pantalon et Polichinelle. A qui veut mesurer ce que peut recouvrir le charlatanisme de la légalité et de la justice, il convient de fournir un historique exact des grimaces de ces gens là. Et qui voudra connaître les dernières ressources du charlatanisme de la science étudiera avec fruit la feinte et la parade de ces mêmes bouffons. On connaîtra l'un et l'autre charlatanisme, on verra ces deux fleurs de pitrerie suprême unies et mariées sur le même rameau, en concentrant toute l'étude et toute la recherche sur la personne de M. Joseph Reinach. Ce type unique d'hypo- crisie et de fraude, beaucoup plus complet que Dreyfus, repré- sente l'idéal filou dreyfusien. Quand l'heure aura sonné de le mettre en prison, on pourra hésiter entre une baraque foraine et la vitrine d'un musée. Un homme qui ressemble de si près à ce qu'il doit être, qui remplit, accomplit, réalise si pleinement sa formule ignominieuse, finit par inspirer une espèce d'estime, mêlée de complaisance et d'un peu d'amitié. Je lui sais gré, je l'aime d'être pur et d'être parfait. Mais ce n'est pas le moins du monde un type d'intelligence. Il est bête, el peut-être bon. Sa niaiserie profonde se laisse surprendre assez naïvement à l'œil nu. Mais un ardent instinct vital peut fournir à un homme, surtout à la variété sémitique de l'homme, le succédané, l'approximation et presque l'équivalent de l'intelli- gence. Tout ce qu'il a d'esprit, M. Reinach le tient de ce premier fond animal. Je ne lui prête pas de mesquine cupidité. Il n'eut à l'origine aucune ambition médiocre. Son seul souci était de conserver et de consolider entre les mains des siens, de ses affranchis et de ses clients, le Gouvernement de la France. Par malheur, le jour vint Oli ce rêve si simple et si naturel se trouva menacé. On faillit appliquer les lois, les justes lois, à son oncle, l'illustre escroc du Panama. Cette tentative timide, arrêtée à temps par un mi- nistre (M. Loubet), porta le premier coup à la sécurité du jeune oligarque, alors député et officier de réserve, qui traitait en égales toutes les puissances françaises, ayant succédé à son patron Gambetta comme amphitryon de l'opportunisme. Mais il lui arriva bien pis, deux années plus tard : on mit en jugement, mais en jugement régulier, sans mesure de faveur ni de privi- lège, sans la moindre dérogation aux prescriptions du code, ni à la teneur de l'usage, un capitaine juif, homme riche et considéré à la synagogue. Cet accusé fut convaincu de trahison, ce traître condamné, ce condamné dégradé et conduit au bagne, comme s'il n'eût pas fait partie de la plus ancienne aristocratie du monde. Israël perdait-il ses modernes immunités ? Le droit commun ! Le sort commun ! A ce coup de tonnerre éclatant dans son ciel, M. Joseph Reinach reconnut l'avertissement. Comme Drumont l'a bien marqué, le juif qui est oppresseur dès qu'il cesse d'être opprimé se revoit opprimé du moment qu'il n'opprime plus. M. Joseph Reinach vit en rêve un collier de joug préparé au loin pour sa race. Il résolut de se délivrer de cette imagination mena- çante. La cause juive devint le cœur de son cœur. Noble mobile: saluez. Ce n'est pas de sa faute si le cœur que la nature avait composé à M. Joseph Reinach n'était pas sensible aux chatouille- ments du scrupule, si les moyens bas, détournés, immondes n'y pouvaient éveiller aucun mouvement de dégoût. Ce patriote juif a toujours le droit de se dire, comme l'homme d'Etat français, qu'il a servi, servi les siens. >